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Vivre une rupture (en voyage solo)





Vous ne prévoyez pas quand ça va arriver et on anticipe rarement ce genre de surprise au milieu d'un périple, surtout si c'est une aventure attendue depuis longtemps. Que ce soit la rupture d'une relation longue ou d'un amour de voyage, cela est douloureux et il manque l’environnement sécure qui serait nécessaire pour "digérer" la perte. Alors comment faire? Rentrer à la maison ? si on a encore un chez soi… pour de nombreux/ses digitales nomades, cette option n’en est plus une. Et le retour à la maison n’est pas toujours la solution, même si pour certaines, cela peut être une étape bénéfique.

 

Dans cet article, je vous propose des réflexions pour discerner ce dont vous avez besoin et des pistes pour reconstruire un sentiment de chez soi, où que vous soyez et affronter l’épreuve de la séparation, avec le plus de douceur possible...


1.     S’arrêter, se poser 2.     Installer une routine

3.     Définir une personne de soutien

4.     Méditer ou contempler

5.     Se féliciter pour les petites victoires

 

 

1.     S’arrêter

 

Cela implique de s’autoriser à mettre le voyage sur pause, dans une certaine mesure et pendant un temps qui sera spécifique à chacun (de quelques jours à quelques semaines...). C’est important, au risque de faire l’économie du travail de deuil ou de se mettre en situation de risque.

 

Cette « interruption » peut prendre plusieurs formes :

 

-rentrer à la maison : si vous avez encore un chez soi ET que ce lieu est synonyme de sécurité et réconfort. Rentrer à la maison est aussi nécessaire si vous sentez que vous perdez pied et n'êtes plus en mesure d’assurer correctement votre équilibre. En effet, en tant que voyageur solo, vous êtes garants de votre sécurité et de beaucoup de choses au quotidien qui demande de l’énergie (déplacements, hébergements, adaptation aux codes locaux...). Si l’épreuve de la rupture ne vous permet plus de bien veiller à vos besoins, il est nécessaire de trouver un refuge, qui dans certains cas, peut être le domicile, si cette option est encore envisageable.

 

-créer un refuge transitoire : il s’agit d’un endroit dans le pays où vous êtes où il est possible de vous poser un certain temps et d’installer une forme de stabilité. Là ou cet évènement fait "rupture", il peut être utile de vous raccrocher à une forme de continuité dans la période qui suit.

Selon votre besoin, ce lieu peut être un endroit plutôt calme, tranquille ou bien socialement stimulant. Cela peut être une auberge de jeunesse, une guest-house, un air B and B, un monastère ou un ashram. Il est important d’avoir votre propre espace et du temps. Deux ingrédients importants pour le processus de deuil...

Il est préférable d’éviter trop de déplacements, la prévisibilité est importante car les ressources sont tournées vers l’intérieur : peu d’énergie est disponible pour l’organisation, la gestion d’imprévus et de transports (le corps aussi a besoin d’être ménagé).

 

Tip : Cette étape peut demander d’affronter la culpabilité d'interrompre momentanément le voyage, surtout si le temps est limité et que l’on doit renoncer à des étapes. On peut se rappeler que plus on repousse cette parenthèse, plus l'état émotionnel et le reste du voyage risque d'en être impacté. Il s’agit de choisir entre : en faire le plus possible, le cœur à moitié guéri…ou prendre le temps du soin, quitte à abandonner certaines parties du voyage, pour ensuite mieux repartir...




 

2.     Installer une routine

 

Une fois posé, il s’agit de mettre en place une régularité dans le quotidien :

-horaires de lever/coucher

-repas

-repos/activité physique (petit à petit, après une première phase où on peut privilégier le repos)

-soins du corps

-temps où ne rien faire (c’est aussi important)

-Solitude/contact avec les autres

-temps à l’intérieur/à l’extérieur...

 

Même s’il est normal à cette étape de ne plus ressentir l’élan ou d’être centré sur le manque, il est important de prévoir des choses qui vous font d’habitude plaisir : manger ces petits plats qu’on aime, écouter ces musique qui nous font du bien, s’offrir un massage, s’entourer de beauté et passer du temps dans la nature, marcher…


Il est probable qu’à ce stade, cela ne vous procure pas de réconfort et que vous trouviez même cela inutile. C’est tout à fait normal, mais pour autant, ne négligez pas ce soin que vous vous apportez, c’est une manière de réanimer petit à petit la vitalité.

 

Le sommeil aussi est important, pilier de la santé. C’est le temps où votre cerveau digère et update la situation. Voyez le comme un moment précieux, constructif, auquel vous veillez.

Continuez à vous nourrir de manière qualitative en évitant la junk food, même si le goût n’y est pas. Cocoonez vous avec de bons aliments. Le corps et l’esprit sont reliés et si nous nourrissez bien votre corps, vous nourrissez aussi votre esprit et votre coeur dans cette épreuve. Et il n'y a pas que la nutrition physique mais aussi toutes les nourritures sensorielles : couleurs, odeurs, textures, atmosphères...qui peuvent vous soutenir.


 

 

3.     Définir une personne de soutien

 

Il n’y a pas besoin qu’il y ait du monde, mais au moins une personne de confiance qui prend des nouvelles régulièrement, suit votre situation. Ce peut être un ami, une personne de votre famille, une personne que vous sentez concernée par ce que vous vivez et qui a à cœur de s’assurer que vous gardiez la tête hors de l’eau.

 

Ce lien est à la fois un appui et un garde-fou. Il va vous permettre de garder un regard extérieur sur votre situation et d’identifier s’il faut réagir à un moment donné. L’objectif n’est pas que cette personne vous secoue ou vous contrôle, mais l’intention est pour vous de garder un lien comme une ancre, pour ne pas vous noyer dans vos émotions et garder le contact avec un point de vue neutre bienveillant.

 

Il peut aussi être utile (voire indispensable selon votre niveau de détresse) de faire appel un psychologue qui pourra vous accompagner à distance. Il est préférable de se tourner vers un professionnel qui a une connaissance des enjeux de la mobilité et qui puisse comprendre les spécificités d’une rupture dans le contexte d’un séjour à l’étranger, en dehors de vos repères familiers.

 

Le psychologue pourra vous inviter à faire des liens entre ce que vous traversez et votre type d’attachement afin de vous aider à mieux naviguer cette période et comprendre ce qui se joue pour vous, en fonction de votre manière d’entrer en relation.

Par exemple, les personnes avec un attachement évitant auront plus de mal à solliciter de l’aide (que ce soit d'un ami ou professionnel) car elles se sont construites sur l’idée qu’elles doivent s’en sortir par elles-même et que personne n'est en mesure de les soutenir (mieux qu'elles mêmes). Au contraire, les personnes avec un attachement anxieux pourraient avoir tendance à surinvestir une aide extérieure et à se sentir vite très démunies lorsqu'elles se retrouvent seules. Selon votre type d'attachement, la manière de gérer la rupture pourrait être différente. Les personnes à tendance évitante sont plus susceptibles de vivre le pic d'émotion (si elles s'autorisent à le ressentir) à distance de la séparation (quelques semaines après) alors que les personnes à tendance anxieuse ressentent en général davantage la détresse la plus grande dans les suites immédiates de la rupture.

 

Il y a un enjeu important à oser demander de l’aide, exposer sa vulnérabilité.

Une rupture amoureuse, au-delà de la douleur qu’elle représente, est une occasion d’apprendre à mieux se connaitre et comprendre comment nous fonctionnons en lien. Et si c'était l'opportunité aussi de guérir de blessures d’attachement qui sont même préalables à la rupture ?




 

4.     Méditer ou contempler

 

C’est se laisser ressentir le chagrin, sans chercher à le supprimer, le diminuer ou s’en distraire, un jour à la fois. Evidemment, il ne s'agit pas de ressentir l'entièreté et massivité de la peine d'un seul coup, on peut y aller au "goutte à goutte". L'important est de ne pas bloquer l'émotion. Il est normal de vous sentir triste et même désespérément triste. C'est aussi à travers le processus de cette émotion que se fait l'intégration de la perte.

Il est important de vous souvenir que cette période est temporaire, c’est-à-dire que tout est impermanent, y compris le manque et le sentiment de fatalité. Il est nécessaire comme mentionné, d’avoir au préalable installé la prévisibilité que donne un lieu et une routine stable, qui permettent de faire cette expérience difficile mais guérisseuse du contact bienveillant avec la souffrance.

 

La méditation est une pratique d’attention qui permet d’ouvrir un espace pour simplement être en lien avec son chagrin, sans rien faire d’autre. Juste sentir, sans juger, analyser ou mentaliser.

 

Je citerai ici Thich Nhat Hanh : « Méditer, ce n'est pas éviter les problèmes ou fuir les difficultés. C'est au contraire trouver la force de les affronter. La méditation n'est pas une évasion mais une rencontre sereine avec la réalité”.

 

Si vous n'êtes pas familier avec la pratique méditative, il peut s’agir simplement de contempler : la nature, ce qui nous entoure, nos sensations. Sans rien faire d’autre. En se laissant vivre le chagrin, les pleurs ou la colère... L'injustice, l'abandon, le rejet...tout ce qui se présente sans filtrer. Cela existe, il s’agit d’être avec, de respirer avec, accueillir l’émotion telle qu’elle est, sans chercher à la transformer. Et c’est déjà énorme.



 

 

5.     Se féliciter pour toutes les petites victoires

 

Car il ne faut pas oublier de remplir son réservoir d’estime de soi qui est mis à l’épreuve dans le contexte d’une séparation…

Il n’y a pas de petites victoires. Vous avez pris une douche, bravo ! Vous avez envoyé un message à un ami, félicitations ! Vous êtes sortie manger ? c’est super, vous activez vos ressources l'une après l’autre, vous pouvez être fière de vous.

C’est l’occasion d’apprendre à vous apprécier tel(le) que vous êtes, même quand vous êtes fragile. Surtout quand vous êtes fragile...vous avez le droit d'être vulnérable. C'est même une force paradoxalement.

 

Ayez conscience du pouvoir que vous déployez chaque jour pour faire face à cette situation, d'autant plus dans le contexte d'un voyage. Quelque soit le choix que vous avez posé (rentrer ou rester), l'un et l'autre demandaient beaucoup de force, vous avez décidé de vous choisir et de prendre soin de votre personne. C’est ainsi qu’on guérit, qu’on referme des portes pour en ouvrir de nouvelles, vers des possibles encore insoupçonnés :)

 

Courage, vous êtes en bon chemin, un jour à la fois...  

 

 

 

 

 

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